Un outline est tout simplement un plan du scénario. Scène 1, suivi de la Scène 2, Scène 3, jusqu’à la dernière scène et le mot FIN.

En France il n’y a pas vraiment de mot dédié. On peut dire fil-à-fil, scène-à-scène, step-sheet, chemin de fer… L’outline est un outil que le scénariste garde généralement pour lui. L’outline peut faire une page, mais il peut tendre vers un format plus long, un mini « séquencier »car il est généralement moins précis que ce dernier, qui est un document que l’ont remet au producteur.

Mes outlines peuvent être longs. Le travail le plus difficile est de m’assurer que l’histoire retrace et gère les fils de toutes les sous-intrigues. Une autre considération est de réfléchir aux transitions, comment faire en sorte que chaque passage d’une scène et d’une séquence à l’autre soit le plus fluide et le plus transparent possible. En plus de verrouiller la structure de l’histoire, je réfléchis à chaque scène en me posant une série de questions :

⁃ Quel est l’intérêt de la scène ?

⁃ Quel est le début, le milieu et la fin de la scène ?

⁃ Quels personnages devraient être dans la scène et pourquoi ?

⁃ Quel est le conflit dans la scène ?

⁃ Comment entrer / sortir de la scène ?

Cela pourra changer lors de la rédaction du scénario – ainsi que l’ordre des scènes – mais il est bon que je pense aux scènes à l’avance.

Je viens d’en sortir un de mes archives qui contient 32 pages à simple interligne. Car j’aime ajouter tout ce que j’ai en magasin pour chaque scène : images, dialogues, dynamiques internes, transitions, et ainsi de suite.

Ok, prenez une grande inspiration et réalisez maintenant que, après avoir fait tout mon travail préparatoire – Concept de l’histoire, Brainstorming, Documentation, Développement des personnages, Développement de L’intrigue, puis Outline – je n’ai toujours pas écrit un seul mot du scénario !

De mon point de vue, faire le travail difficile dès le début – la phase de préparation – donne plus d’espace ensuite pour libérer une pensée créative lors de l’écriture des pages de scénario.

Mais soyons clairs : je ne dis pas que tous les écrivains doivent travailler de cette façon. Chaque auteur doit trouver l’approche qui lui convient.

Voici deux exemples opposés.

Neil Simon tout d’abord, qui évite les outlines :

« Quand je commence, je sors des post-its jaunes et j’esquisse l’ensemble de l’histoire. Puis je commence à écrire le texte, et les personnages commencent à vouloir s’éloigner où ils veulent aller. Je les remets donc dans mon plan mais ils me disent :  » Nous n’aimons pas ce plan, nous voulons d’autres post-its jaunes. Ces post-its jaunes puent. Alors je continue à essayer de les y forcer, et je réalise que je ne peux pas le faire. À ce stade, je ne fais plus d’outline du tout. Je ne fais un plan que dans ma tête. Si je peux définir mon histoire en deux ou trois phrases, alors j’ai une histoire.  C’est tout ce dont j’ai besoin, parce que quand j’écris quelque chose, je veux être surpris – et cela vaut aussi pour l’écriture du scénario original – je veux être aussi surpris que le public l’est. Si je sais tout avant, ça devient un travail. Je préfère laisser faire et voir où ça mène. »

Ok, c’est un extrême. Inversement, il y a le scénariste-réalisateur Paul Schrader, qui est connu pour réaliser des outlines si détaillées qu’il peut prédire en un quart de page combien de temps chaque scène durera avant de l’écrire. Voici son point de vue :

Question : « Rédigez-vous à chaque fois l’outline de votre scénario en une seule page? »

Réponse : « Oui. Et ensuite, je recommence. Sur le dernier, je suis passé directement de l’outline au scénario. Mais d’habitude, si je me doute de l’idée, je me lance dans un outline séquence par séquence. Un outline par séquence c’est… disons que dans un film moyen, il se passe entre 45, 55 ou 60 temps forts. C’est ton plan, la liste des choses qui se passent. Ce n’est pas la liste des plans, ni la liste des scènes et des accélérations, c’est juste les événements qui arrivent. Ils se rencontrent à l’hôtel Chelsea, retournent au bureau, passent des coups de fil, peu importe. Vous posez donc chacun de ces éléments sur votre schéma puis vous en faites un paragraphe. Puis vous commencez à inclure le dialogue. Ça grossit. »

Question : « 5 à 8 lignes ? « 

Réponse : « Oui. Ainsi, au lieu d’un plan d’une page, vous avez maintenant un plan d’environ 15 pages, à interligne simple. Et si votre idée survit encore à tout cela, il y a de fortes chances que ça marche. J’ai eu une idée qui fonctionnait à un stade d’outline, mais qui est morte à l’étape du séquencier. Mais quand une idée meurt, c’est, en fait, l’une des meilleures choses qui puissent arriver. Parce que vous vous épargnez énormément de temps et de peine. Certaines idées ne veulent tout simplement pas être écrites. Elles ne veulent pas être écrits par vous. Certaines idées vous ont fait croire qu’elles ont plus de pouvoir qu’elles n’en ont en fait. Si vous l’apprenez après avoir rédigé un premier draft, vous avez perdu beaucoup de temps et vous avez également perdu confiance en vous-même parce que vous croyiez en quelque chose et finalement vous ne pouviez pas le faire. »

Donc, deux extrêmes. Cela dit, j’encourage toujours les jeunes scénaristes à essayer de préparer l’écriture en amont : creuser ses personnages, outliner l’histoire… avant d’écrire le scénario.

Si ça marche pour vous, super.

Sinon, vous êtes libre de faire comme Neil Simon !

© Scott Myers – Article traduit par un.e scénariste membre de La Guilde française des scénaristes.